En effet, un observatoire scientifique filme la vie autour des sources hydrothermales, des environnements extrêmes abritant crevettes aveugles, crabes géants, moules et vers tubicoles. Les skippers de la transat survolent même quelques-unes d’entre elles en traversant la dorsale médio-Atlantique. S’ils n’en savent rien, c’est tout simplement parce que cette chaine montagneuse est à plus de 1700 mètres de profondeur. L’observatoire fonctionne en continu et produit donc des centaines de milliers d’images. Trop nombreuses pour être toutes étudiées par les chercheurs, Deep Sea Spy les confie aux citoyens et transforme la recherche en aventure collective.
Un terrain de jeu : les abysses
Accessible en ligne, Deep Sea Spy fonctionne comme un jeu intuitif. Après un premier tutoriel qui explique comment reconnaître les principales espèces des grands fonds, chacun se voit confier une série de photos à analyser. La mission consiste à repérer les animaux : crabe, poisson, escargot des abysses ou colonie de moules géantes. Un système de niveaux et de récompenses rend l’expérience ludique et un classement permet de se situer par rapport aux autres espions. Le principe séduit largement : en 2024, ce sont plus de 1300 images uniques annotées. Or, chaque image est soumise à au moins 10 participants afin de renforcer la fiabilité des résultats : ce sont donc en réalité plus de 13000 images annotées. Cette vérification collective est essentielle, car elle permet de distinguer les observations des erreurs. Une fois validées par les équipes scientifiques de l’Ifremer, ces données aident à mieux comprendre l’évolution de la biodiversité des abysses, et entraînent un algorithme d’intelligence artificielle capable d’identifier automatiquement les espèces. Plus la participation sera élevée, plus l’algorithme sera performant. Au-delà de la recherche, l’expérience propose à chacun de se glisser, le temps d’une session, dans la peau d’un explorateur des profondeurs, avec le sentiment de contribuer à la connaissance des océans.