TCO25_Portraits_Solidaires en peloton

Les copains d’abord Thibaut Vauchel-Camus et Damien Seguin

Ocean Fifty
Village départ Le Havre  |  19 octobre 2025 - 10h30
De la cour de récré à l’océan, Thibaut Vauchel-Camus et Damien Seguin forment l’un des duos les plus complices de la course. Liés par une amitié tissée il y a plus de 25 ans, ils ont grandi ensemble sur l’eau en Guadeloupe avant de se retrouver, des années plus tard, à la barre du même Ocean Fifty. Ensemble, ils s’apprêtent à écrire un nouveau chapitre en traversant l’Atlantique pour rallier le soleil des Caraïbes, là où tout a commencé.

C’est sur les bancs de l’école, en Guadeloupe, que débute l’histoire de Thibaut Vauchel-Camus et Damien Seguin (Solidaires en Peloton, Océan Fifty). A l’époque Thibaut cherche un coéquipier pour naviguer. Entre deux dessins sur leur cahier d’anglais, l’alchimie opère. "On s’est dit : dis-donc on ferait pas du bateau ensemble ?", raconte Thibaut. Une amitié nait, une complicité aussi. 

 

À la vie, à la barre 

Sur les eaux des Caraïbes, les deux jeunes marins se sont bien trouvés. Ils performent en catamaran de sport et finissent par s’envoler pour l’Australie en 1998 pour le championnat du monde de Hobie Cat. "On avait récolté de l’argent en vendant des tee-shirts, se remémore Damien, ça nous a permis de financer le voyage." Et il n’aura pas été vain puisqu’ils décrochent la médaille d’argent. 

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Le duo met ensuite les voiles vers l’Hexagone où leur sillage finit par se séparer. "On a passé deux ans ensemble, poursuit Damien, puis ensuite on a fait chacun notre bonhomme de chemin. On s’est toujours suivis de loin. On s'est croisés sur les régates, que ce soit en catamaran de sport ou en course au large. Mais on n’avait jamais re-navigué ensemble jusqu’à cette année." 

Comme une histoire (heureuse) qui se répète, en début d’année, Thibaut cherche à nouveau un co-skipper. Damien vient de terminer sa deuxième campagne de Vendée Globe et rêve de multicoque. "Je m’étais ouvert une shortlist avec six noms et des critères précis, explique Thibaut. On a fait évoluer nos règles de classe, le routage n’est plus autorisé sur les courses en double en Ocean Fifty donc j’avais besoin d’un profil avec une solide expérience en navigation et en analyse météo. Damien cochait toutes les cases. Même si on prend les décisions finales ensemble, il a une meilleure finesse que moi sur cet aspect."

La confiance, mère de sûreté

Le binôme de copains se reforme, comme une évidence. "Je pense que c'est toujours resté dans un petit coin de tête, l’air de rien, confie Damien. Et là, les planètes se sont alignées." Malgré leurs parcours impressionnants, les deux navigateurs préfèrent rester humbles. Leur force, ils la voient avant tout dans leur complémentarité. "Ce qu’on a vite retrouvé, c'est la confiance en l’autre, poursuit Damien, Thibaut a la connaissance du bateau. Nous avons un cumul d’expérience à nous deux, ce respect l’un pour l’autre aussi, très vite on a basculé sur la performance." Un point de vue que partage Thibaut, convaincu que leur complicité est leur meilleur atout. "Je trouve intéressant d’avoir la patte d’une personne qui sort de deux campagnes IMOCA et de trois campagnes paralympiques. Mais la confiance reste primordiale car tu peux avoir les deux meilleurs cadors sur un bateau, si ça ne matche pas humainement, ça ne marche pas. Avec Damien, je sais que je peux aller dormir sans me poser de questions. Il a un bon scan du bateau, de ce qu'il a sous les yeux pour trouver la bonne manette."

 

"Je m’attends à mon propre tournant"

Il y a deux ans, Thibaut l’emportait avec Quentin Vlamynck dans la baie de Fort-de France. "Quand on a montré qu’on est capable de gagner, on est attendu au tournant, confie Thibaut. Je m’attends moi-même à mon propre tournant !"

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Mais depuis, la classe Ocean Fifty s’est étoffée et en partie renouvelée, accueillant plusieurs skippers venus de l’IMOCA et de la Class40. Le niveau est monté d’un cran. Plus de la moitié de la flotte peut viser la victoire. "Le plateau est relevé, on a eu des vainqueurs différents tout au long de la saison, analyse Thibaut. Prenons Edenred, les marins sont bons, le bateau est bon, aussi bon que le nôtre. On peut se dire qu’ils vont peut-être avoir des problèmes inhérents à la jeunesse du projet, mais ils gagnent dès la première course, sans que ce soit la chance du débutant. Le jeu est vraiment ouvert et c’est peut-être ce qui va nous enlever un peu de cette pression du tenant du titre, pour la partager avec tous les concurrents." Une lecture que partage Damien sur ce plateau plus homogène. "On sait que ça va se jouer sur des détailsOn l'a bien vu sur les précédentes courses, les bateaux sont prêts, les duos aussi. La différence se fera sur la météo, la stratégie ou la tactique pour créer des écarts. Ça va batailler fort jusqu’à la fin."

Et la course au large est loin d’être une science exacte, la classe en a fait la douloureuse expérience en 2023 lorsque la moitié de la flotte avait dû abandonner avant même de passer le Portugal. "On connaît la part d’aléas qu’il peut y avoir dans un sport mécanique comme le nôtre, reconnaît Thibaut. Les arrêts au stand de trois secondes et demi ça n'existe pas chez nous. Tu peux vite tout perdre sur un détail. L’enjeu, c'est déjà de partir serein sur un bateau fiable, savoir le maîtriser et ne pas aller se créer de "l’aléa" inutile. Le sort se suffit à lui-même."

 

Une chose est sûre : l’ambition est là, portée par un parfum d’enfance, celui des tambours antillais, et des épices créoles. Pour ces deux enfants de la Guadeloupe, naviguer vers la Martinique, l’île sœur, a le goût d’un retour aux sources et à leurs racines. 

 

Interview : Thibaut Vauchel-Camus & Damien Seguin - Solidaires en Peloton

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