Poisson

Evaluation des populations de poissons Une exploration signée Ifremer

Édition 2025  |  31 octobre 2025 - 11h15
Evaluation des populations de poissons en cours à bord du navire Thalassa.

Lors de leur passage au large de la pointe bretonne, les skippers pourraient croiser le navire océanographique Thalassa, en pleine mission d’évaluation des populations de poissons. Comme chaque automne depuis 1987, l’Ifremer coordonne en effet une campagne scientifique intitulée EVHOE. Chercheurs et techniciens sillonnent pendant plusieurs semaines le golfe de Gascogne et la mer Celtique pour y évaluer l’abondance des poissons et caractériser l’état de l’environnement marin. Plus de 150 stations sont échantillonnées selon un protocole rigoureux : identification, comptage et mesure des espèces capturées, prélèvement d’otolithes (os de l’oreille interne) pour déterminer l’âge des poissons, enregistrement de la température et de la salinité des eaux…

Ce type de campagnes menées sur l’ensemble des côtes métropolitaines et à différentes périodes de l’année permet d’alimenter l’évaluation nationale de l’état des poissons. Des progrès ont été accomplis pour réduire la surpêche. Selon le dernier bilan Ifremer publié en début d’année, environ 58 % des volumes de poissons débarqués en France métropolitaine provenaient de populations exploitées durablement, contre 39 % en 2015. Une avancée encourageante, mais l’objectif d’une exploitation durable des populations, fixé par la Politique commune des pêches pour 2020, n’est toujours pas atteint. Une part importante des captures est issue de populations surexploitées (19 %) voire effondrées (2 %). 

 

Pour en savoir plus : 

Comment vont les poissons ?

 

Certaines espèces emblématiques, comme le merlu européen ou les baudroies (lottes), montrent des signes de rétablissement grâce à des quotas stricts et une gestion adaptée. A contrario, des espèces autrefois abondantes comme le cabillaud (morue) de mer Celtique ou le merlan sont aujourd’hui considérées comme effondrées. Plus inquiétant encore, des espèces comme la sole du golfe de Gascogne affichent un déclin du recrutement, c’est-à-dire du renouvellement des jeunes poissons. Cela traduit une fragilité des écosystèmes face à des pressions multiples : pêche intensive, pollution côtière, destruction des habitats et réchauffement climatique. Ce dernier entraîne des modifications de répartition géographique, avec la montée vers le nord d’espèces thermophiles comme le rouget barbet, tandis que d’autres, comme le cabillaud, peinent à subsister dans des eaux trop chaudes.

 

La campagne halieutique EVHOE 2019

Le travail de terrain mené par les scientifiques notamment sur la campagne EVHOE permet de constituer l’une des plus longues séries de données halieutiques d’Europe. Ces informations sont essentielles pour suivre les déclins et les rémissions des populations au fil des ans et alimenter les modèles scientifiques du Conseil international pour l’exploration de la mer qui orientent les politiques de quotas. La stabilité des populations de baudroies, la régression persistante du cabillaud celtique, ou encore la baisse du recrutement de la sole de Gascogne ont toutes été mises en évidence grâce à EVHOE. Au-delà des poissons, la campagne observe aussi la mégafaune (dauphins, oiseaux), le zooplancton, les espèces profondes, les macro-déchets, la nature des fonds… Alors que les changements climatiques imposent de repenser les modèles de gestion, ces suivis réguliers constituent un outil précieux d’anticipation des bouleversements.