Claudie Haigneré, vous êtes, cette année, la marraine de la TRANSAT CAFÉ L’OR Le Havre Normandie. Pourquoi avoir rejoint cette aventure ?
Claudie Haigneré : Vous savez, je suis née en Bourgogne, j’ai plutôt les pieds sur terre qu'en mer. Cependant, j’ai eu la chance d’assister à des départs de course au large, et à chaque fois, l’excitation procurée par ces moments intenses était partagée par tous ceux qui restent à quai, solidaires de cette aventure magnifique.
Ce qui m’a d’abord plu dans la TRANSAT CAFÉ L’OR, ce sont ces navigateurs, explorateurs des limites, qui les repoussent et les dépassent. C’est une histoire individuelle ou en équipage dans une alchimie collective, proche de notre préparation d’astronaute. Ensuite, nous partageons cette prise de conscience de notre connexion à un environnement qui nous dépasse, magnifique, fragile, parfois hostile, la nature, la planète et ses océans, l’espace. Et le troisième aspect qui m’a convaincue, c’est le village qui va accueillir la course. Pendant une semaine, les activités éducatives, les rencontres et les conférences, qui se tiendront au Havre, vont permettre de donner envie de comprendre, de se questionner et de stimuler notre capacité de curiosité et d’émerveillement pour vivre pleinement la TRANSAT CAFÉ L’OR.
Vous l’avez dit, avec l’organisation de la TRANSAT CAFÉ L’OR, vous avez toutes les deux un attachement commun pour la planète. A-t-on une vision différente sur notre environnement et nos écosystèmes depuis l'espace ?
CL : Le regard depuis l’orbite sur la terre (que ce soit celui des satellites ou l’œil de l’astronaute) pourrait se comparer à celui d’un ange gardien sensible et vigilant. On admire sa beauté mais aussi sa fragilité, sa vulnérabilité à travers le hublot : la si mince couche protectrice de l’atmosphère permettant la vie, les tempêtes de sable, les cyclones, les éruptions volcaniques, les méga-feux. Certes, on fait le tour de la planète en 90 min, parce qu'on est à 28 000 km/h, donc on va un petit peu plus vite que les marins. Mais on a le temps de penser que notre Terre est comme un vaisseau spatial qui transporte notre humanité, dans son voyage dans le système solaire. On prend conscience de la finitude de la planète et de notre responsabilité en tant qu'équipage de ce vaisseau, de la préserver.
Nous avons une magnifique planète : la Terre, j’en étais déjà consciente au sol et encore plus convaincue en orbite. Le propos n'est pas de quitter A pour aller chercher une planète B où s’installer. Nous ne sommes pas là pour renoncer et fuir, mais pour préserver ce bien commun de notre humanité et comprendre notre chance exceptionnelle d’y séjourner.
Je suis heureuse de voir que pour la TRANSAT CAFÉ L’OR, cette thématique de responsabilité environnementale est mise en avant. C'est important que la prise de conscience de notre responsabilité ne se fasse pas obligatoirement par des règlements ou des discours politiques, mais qu’elle puisse être aussi une expérience sensible pour chacun. Quand on en parle depuis l'espace, quand on en parle depuis la mer, quand on en parle en témoignant de l'aventure humaine, avec nos émotions, notre regard, nos mots, je trouve que nous avons un impact bien plus important.