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Au large, l’amour ouf Caroline Dieu et Jérôme Delire

Class40
22 octobre 2025 - 11h00
Ils se sont rencontrés au lycée près de Bruxelles et sont tombés amoureux dix ans plus tard. Devenu passionné de voile et de mer, Jérôme a convaincu Caroline de le suivre. Lui est skipper professionnel dans la croisière, elle est devenue experte maritime. Après avoir réalisé un tour du monde, les voilà à l’orée d’un nouveau défi, la TRANSAT CAFÉ L’OR Le Havre Normandie, leur première grande compétition de course au large.

Le monde de la course au large les a découvert jeudi dernier. Alors que l’ensemble des skippers est présenté à la presse au Docks Océane, dans la salle de basket du Havre, Caroline et Jérôme ont retenu l’attention. Un détail a en effet attiré tous les regards : les deux marins se donnent la main. Quelques secondes en pleine lumière, l’un à côté de l’autre, et la meilleure illustration de ce qu’ils sont, en mer comme à terre : jamais l’un sans l’autre. « Dans nos têtes et dans nos entourages, on ne forme qu’un, c’est Jérôme et Caroline, confie-t-elle ce mardi depuis leur bateau. Parfois, il y a des jours où on se chamaille mais on ne remet jamais en question nos sentiments. Moi sans lui ce n’est pas possible, et l’inverse est vrai aussi ». 

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Caroline Dieu et Jérôme Delire, INNOVAD.GROUP - XLG

« Les premiers voileux de la famille » 

Si les deux s’apprêtent à disputer la TRANSAT CAFÉ L’OR Le Havre Normandie, leur histoire a débuté bien loin des pontons et de l’océan. Les deux Belges ont grandi en périphérie de Bruxelles, à une centaine de kilomètres de la côte la plus proche. Caroline et Jérôme se rencontrent au lycée, il est plus âgé qu’elle de deux ans, mais ils fréquentent le même cercle d’amis. En revanche, il n’est pas encore temps de parler de large. « Dans nos deux familles, personne ne faisait de la voile », confie Jérôme. « Nous sommes les premiers ‘voileux’ de nos familles », abonde Caroline. 

Le virus de la mer, c’est Jérôme qui est le premier à l’avoir. « Ça s’est fait presque par hasard », sourit-il. Il évoque « un petit lac », « une mare aux canards » à une dizaine de kilomètres de la butte du Lion de Waterloo. « Il y avait des stages d’Optimist qui étaient proposés et ça m’a bien tenté ». Jérôme découvre le support à 7 ans avant d’enchaîner les stages. Il participe rapidement à ses premières compétitions et en dispute « pendant 10 ans » jusqu’à ses 18 ans. Pourtant, le jeune homme ne souhaite pas poursuivre les courses. « J’en avais ras le bol de faire des ronds dans l’eau entre quatre bouées, ça ne m’amusait plus ». 

« On s’est vraiment rencontrés en mer »  

Jérôme commence alors à monnayer ses services comme skipper sur des bateaux de croisière. « De fil en aiguille, j’en ai fait mon métier ». C’est à ce moment-là qu’il retrouve Caroline, dix ans après les années lycée. Elle est comptable dans une société, « en tailleur et en talons tous les jours » raconte-t-il. « Au deuxième rendez-vous, il me dit : ‘je veux faire de la voile et un tour du monde’ ». Caroline avait déjà participé à une régate et traversé la Manche. Alors elle le prend au mot et lui dit « pourquoi pas ». « Je me suis dit qu’il fallait au moins essayer, explique-t-elle. Si ça ne me plaisait pas, je ne prenais pas un grand risque ». 

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© Jean-Marie Liot / Alea

Et voici le couple lancé dans de folles aventures. C’est donc au large qu’ils se découvrent, notamment au fil d’une première transatlantique. « En mer, tout est exacerbé, les points positifs comme les négatifs, rappelle Caroline. Et puis tu ne peux pas être faux, tu ne peux qu’être honnête, qu’être toi-même ». « On peut dire qu’on s’est vraiment rencontrés en mer », complète Jérôme. Dans la foulée, le couple se marie puis achète un voilier « pour notre premier anniversaire ». La suite, c’est un tour du monde débuté en 2019 à bord d’un IMX38, un petit monocoque. Il passe par le Panama, rallie Tahiti à la Réunion, file vers l’Afrique du Sud puis remonte jusqu’en Espagne. Au cours de leurs pérégrinations, ils partagent le pont avec un invité de marque : Tiki. C’est un chat qu’ils ont recueilli sur l’île d’Hiva Oa, aux Marquises avant qu’il ne prenne ses aises à bord jusqu’à leur retour sur le Vieux Continent.

TCO25 Caroline Dieu et Jérôme Delire, INNOVAD.GROUP - XLG

« Parfois, on se demande ce qu’on fout là » 

C’est également lors de leur tour du monde qu’ils ont eu « le déclic de la course au large ».  « Entre Tahiti et la Réunion, on a fait 10 000 milles sans escale, confie Jérôme. Et après ces deux mois, on s’est dit qu’on avait envie de quelque chose de plus extrême ». « Nous avons envie d’ajouter une nouvelle dimension, de goûter à l’atmosphère de la course et de repousser nos limites », ajoute Caroline. Pour cette transatlantique, le binôme naviguera à bord d’un plan Finot mis à l’eau en 2011, un des quatre Class40 les plus anciens à prendre part à la course. « On ne s’est jamais mesurés à d’autres Class40, ça va être marrant de voir comment on va réagir », précise Jérôme.

Alors que le grand départ se rapproche, les deux font preuve d’une sacrée humilité. « Il y a beaucoup de grands noms, on va être sur la même ligne de départ que Michel Desjoyeaux », assure Caroline. « Parfois, on se demande ce qu’on fout là » dit Jérôme en regardant le bateau d’à-côté, celui de Vincent Riou (Pierreval – Fondation GoodPlanet). Chez le couple, l’excitation a pourtant pris le pas sur les appréhensions. « J’ai hâte de voir où la nature humaine peut nous amener » sourit Jérôme. Reste désormais à écrire ce nouveau chapitre avec la certitude que leur amour leur permettra de résister à tout.